Beaucoup de nageurs (même de très bon niveau) connaissent des sensations particulières en nageant en mer. Et oui, finie la piscine avec tout ce qu’elle contient de rassurant : une visibilité tellement accrue qu’on pourrait compter les carreaux, des longueurs toujours identiques, la possibilité de s’arrêter et à chaque instant un maitre-nageur pour voler à notre secours si besoin.


Alors pourquoi nos peurs s’activent elles en mer et comment passer outre cette émotion et les pensées parasites qui l’accompagnent ?

Quand on rentre dans le domaine des peurs, on se retrouve entre 2 eaux, à mi-chemin entre réalité et perception.

Nager en eau libre apporte pourtant des sensations pleines et entières recherchées par bon nombre de swimrunners, triathlètes ou encore nageurs en eau libre. Il faut cependant reconnaitre que le milieu marin apporte aussi son lot de complications :  

- Perte de repères : c’est bien plus difficile de garder un cap, les bouées peuvent paraitre loin.

- Peur des conditions : la houle, les vagues, le courant sont autant de paramètres changeants pouvant transformer une idyllique promenade en enfer.

- Peur des conséquences : les défaillances ne sont pas pardonnées en mer, loin du bord, même une simple crampe peut avoir de fâcheuses conséquences.

- Des idées loufoques : je ne vois pas le fond et si un monstre marin caché sous un rocher venait me mordiller les doigts de pieds ? (ceux qui ont fait des cauchemars de monstres cachés sous le lit se reconnaitront). Je vois trop bien le fond et toutes ces algues, ces poissons, ça me fait peur aussi !! 

1. Dépasser les peurs

Au lieu de masquer les peurs, on va accompagner le sportif pour les transcender.

Les peurs vont engendrer à leur tour des pensées négatives. La clé c’est de générer des automatismes venant contrer les pensées et les émotions. l’idée c’est de préparer des phrases antidotes immédiatement rassurantes et applicables en situation :  

Si vous êtes en mer et que des pensées négatives affluent, on enregistre au préalabale des phrases que l’on va prononcer dans sa tête, du style :

- mon équipement me protège

- je vois les bouées devant moi,  

- je l’ai déjà fait,  

- je me suis préparé

- j’ai le niveau

- je suis accroché à mon partenaire, j’ai confiance en lui.  

- je sens que la sangle me tire


Bien évidemment, les phrases antidotes seront créées selon chaque personne.

On remet également à jour la perception des compétences, des acquis et de l’expérience. Ces éléments, il faut les préparer en amont pour les déclencher sur commande et les tester en condition réelle pour mesurer leur efficacité.

2. Réduire l'impact émotionnel

Avec des techniques d’hypnose, on va réaligner la peur ressentie avec le danger réel. Comme pour les phobiques de l’avion, certes le danger existe. On n’élude pas cette donnée, après tout c’est bien pour cela que l’on recommande de porter un équipement complet, (combi, lunettes, bonnet visible, bouée…) on cherche à faire redescendre l’impact émotionnel et donc la peur.

On va préparer des routines préalables à la performance, des visualisations très précises (des situations vécues comme si on y était), la clé c’est de focaliser sur une intention particulière, la gestuelle, la position et de ressentir progressivement le plaisir de la sensation de nager en mer, libéré de toute contrainte, de toute pression de résultat.

3. S'adapter aux conditions climatiques

3/ Anticiper des conditions différentes. Vous vous préparez, la mer est calme et le jour de la compétition il y a des vagues et du courant… on peut créer des conditions changeantes. Voir comment le nageur se gère dans des conditions inhabituelles mais provoquées donc avec un filin de sécurité.

4. Des traumatismes gravés à travailler

Les peurs peuvent provenir d’une anticipation exagérée du danger mais aussi d’évènements traumatiques. Si vous avez vécu vous-même ou un de vos proches un accident, un début de noyade, il est possible que cet épisode soit ancré dans la mémoire et se réactive à chaque sortie ou dans des conditions proches., jusqu’à créer de vrais blocages psychologiques.

Pour ceux qui ont vécu un évènement traumatique, on recherche la manière dont l’accident est enregistré, certains vont se souvenir de micro détails, même de l’odeur de l’iode, de la tenue portée, de la sensation musculaire ou respiratoire.  

Selon la gravité et de l’impact de la peur, de son origine, on cherche les processus conscients et inconscients. Un accident récent peut réactiver de plus anciens évènements traumatiques survenus même dans l’enfance.

En parallèle de ces techniques, la clé essentielle c’est de toujours intégrer à chaque sortie l’intention de prendre du plaisir par l’activité en elle-même, par le fait par exemple d’évoluer dans un paysage sublime, de partager ce moment avec des amis, de se récompenser des efforts fournis (l’apéro d’après SwimRun, et les ravitos d'après triathlon ou de nage en eau libre sont de formidables vecteurs de performance).

La zone

L’autre clé, c’est de chercher à progresser à chaque pas à son rythme selon son niveau.

Pour cela on va programmer des paliers de progression permettant de rester dans le flow, cette fameuse zone entre anxiété et ennui, correspondant à l’adéquation entre défi et compétence : Par exemple, s’imposer de nager à une certaine distance du bord ou de nager une certaine distance, se satisfaire de cette réussite avant de rajouter de la complication par exemple en se faisant détacher de son binôme, en rallongeant la distance ou encore en rallongeant son temps de nage en solitaire.

Benoit Pineau, préparateur mental.

- Arbore fièrement le symbole de l’enclume sur ses plaquettes.

- Garde toujours l’esprit du débutant : le Shoshin.

- Fait toujours de son mieux sans viser l’excellence dès le départ : le Kaizen.

- Considère que chaque jour présente des opportunités à saisir : le Kairos

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